240Z vs 370Z par ARGUS AUTO
Le temps de la rigueur
Imaginées pour séduire
Octobre 1969, Nissan se lance à la conquête du marché nord-américain, en important sous le badge Datsun, un petit coupé deux places aux caractéristiques séduisantes. Six cylindres sous le capot, une caisse deux fois plus légère que certaines « muscle cars » du moment, et un tarif presque deux fois moindre que celui des illustres coupés anglais et européens dont elle s’inspire. La 240Z est un concentré de tout le savoir-faire japonais, qui ravit les amateurs du genre par son rapport prix / plaisir imbattable.
Quarante ans plus tard, nous avons ressorti de son box un exemplaire de cette fameuse 240Z pour lui présenter sa descendante : une Nissan 370Z GT Edition, plus fidèle que jamais à la philosophie du « Z », avec sa réputation de drifteuse et ses tarifs à faire pâlir un Cayman. Mais en est-elle la digne héritière ?
Inspirées des références
A ma gauche en short blanc. La 240Z représentait à l’aube des seventies l’une des références en matière de coupés sportifs abordables. Son inspiration stylistique est mondiale : un long capot évoquant la Jaguar Type E, un profil aérodynamique façon Porsche 911, et un arrière tronqué très en vogue chez les coupés transalpins.
A ma droite en short rayé. La 370Z incarne le jouet pour adulte par excellence. Sa silhouette trapue à souhait ne se rapproche plus que d’une seule et unique concurrente, la 911. Nous retrouvons toutefois de nombreux codes stylistiques hérités de son ainée, tel l’alignement quasi parfait du toit avec le hayon, impliquant une découpe si particulière de la vitre de custode.
La 240Z s’illustrait par la pureté de ses lignes, son style léger et harmonieux, subtilement mis en valeur par ses élégants pare-chocs et enjoliveurs chromés.
La 370Z se distingue quant à elle par son design puissant, ses galbes à la limite du caricatural. Son identité stylistique est la plus forte. De plus, elle en impose avec ses gigantesques jantes de 19 pouces, montés sur de larges pneus tailles basses, et ne risque pas de perdre un enjoliveur sur autoroute comme son aînée…
Question d’atmosphère
A bord, le contraste générationnel est encore plus saisissant. Malgré sa taille de guêpe, la 240Z semble étonnamment la plus spacieuse. Minces panneaux de portes, fins montants de pare-brise, tableau de bord épuré, poste de conduite installé au plus près du sol…
Sa conception élémentaire profite également aux sensations. Chaque mouvement de piston, chaque vibration est ressentie, entendue, vécue. L’expérience devient même olfactive, lorsqu’une sollicitation excessive de la pédale de droite, ou du starter durant les phases de démarrage à froid, engorge les carbus et baigne l’habitacle de vapeurs d’essence.
Deux signes trahissent tout de même quelques mesquines économies et gâchent un peu la fête : le trop grand et trop mince volant tulipé en faux bois (bien imité tout de même), n’offre vraiment pas une bonne prise en main. Et les superbes sièges rouges sont confortables… mais en skaï, et n’offrent qu’un maintien latéral relatif.
Côté 370Z, l’ambiance est toute autre. Car c’est dans un flot d’équipements que nous baignons, confinés dans un cockpit douillet, et parfaitement pensé. Nous sommes loin des années 70. Là les sièges sont réglables au millimètre, et fleurent bon le cuir et l’Alcantara. Le bloc compteur est solidaire de la colonne de direction pour une parfaite lecture. Nissan a même amélioré le confort acoustique de notre version GT Edition afin de réduire les bruits de roulement.
En fait, la seule similitude avec la 240Z porte sur la présence de trois manomètres au sommet de la planche de bord. Une question s’impose alors : en perfectionnant à l’extrême la 370Z, les ingénieurs n’ont-ils pas enlevé tout ce qui faisait l’âme de la 240Z ?
La puissance ne fait pas tout
En effet, toute cette débauche d’équipements de confort et de sécurité dont profite la 370Z à un poids. Et les principales qualités de la 240Z – sa taille fine et ses 1040 kg toute mouillée – sont bien loin. Nissan a dut compenser les 450 kg d’embonpoint de la jeunette par un gros regain d’énergie. Le V6 – 3.7 litres développe ainsi aujourd’hui 328 ch à 7 000 tr/min (et 363 Nm à 5 200 tr/min) alors que le 6 cylindres en ligne 2.4 litres de l’ancêtre se contentait de 130 ch à 6000 tr/min (et 202 nm à 4400 tr/min) pour être compétitif avec les coupés sportifs de référence de l’époque.
Mais la puissance ne fait pas tout. Si la 370Z expédie le 0 à 100 km/h en 5.3 secondes et atteint les 250 km/h en vitesse de pointe, alors que la 240Z parait se trainer avec 9 secondes et 200 km/h sur les mêmes exercices, c’est surtout la façon d’y arriver qui compte ! Souple à bas régime, hargneux dans les tours, le 6 en ligne de la 240Z est incapable d’offrir des accélérations aussi brutales que le V6 de la 370Z, mais son caractère se révèle bien moins policé.
Du reste, sa boîte de vitesses à cinq rapports aux débattements courts est bien ferme, et ne demande qu’à être cravachée, en imposant parfois l’aide d’un double débrayage. La boîte de la 370Z l’effectuera quant à elle automatiquement (synchro rev control). Un peu trop facile rétorqueront les puristes…
Un talent inné pour la danse
Avant-gardiste par sa conception, en intégrant notamment des suspensions arrière à roues indépendantes, la 240Z était une vraie référence en terme de comportement routier. Son poids plume lui alloue les talents pour lesquelles elle est appréciée : agile et facile à conduire pour une propulsion. Son empattement court et son long capot abritant un moteur bien lourd, lui offre une tendance naturelle à enrouler les virages, et à se déhancher lorsqu’on sollicite abusivement la pédale de droite sur revêtement gras ou humide. Des aptitudes qui lui permettent de sortir du lot face à ses concurrentes, tel la 911, moins prévenante avec son architecture moteur en « sac à dos », ou globalement celles plus lourdes, qui ont davantage tendance à s’affaisser sur leurs appuis en courbe.
Nissan a réalisé un véritable tour de force en parvenant à reporter ces qualités sur la 370Z, malgré son surpoids, tout en conciliant une tenue de route « moderne ». Outre ses aides électroniques ou son freinage puissant et endurant, les principales différences se situent au niveau de la précision de conduite. Les progrès réalisés permettent de placer la 370Z au millimètre. Le châssis est plus rigide, la direction est plus communicative (et aujourd’hui assistée), les amortisseurs et trains roulants plus polyvalents limitent notamment le roulis. Les limites sont repoussées : vitesses de passages en courbes, motricité accrues… Les sensations de conduite sont différentes de celles ressenties en 240Z, mais pas supérieures. Car rouler à 100 km/h en 240Z ou en 370Z est très différent…
Ce sera bientôt mieux avant ?
Malheureusement, pour répondre aux normes euro5, la 370Z a perdu 3 ch et 3 Nm en 2011. Un petit dégonflage à peine perceptible certes, mais qui ne va pas dans le sens de la philosophie « Z ». Les modèles actuels représentent donc peut-être les dernières chances d’approcher autant de plaisir au volant, avant que les normes antipollution ne brident totalement toutes les ardeurs des constructeurs. Il faut donc se hâter pour profiter du coupé de sport qui représente la bonne affaire du moment. Et c’est certainement là son point commun majeur avec son aïeule…